Il y a longtemps, très longtemps
que j'ai été extrait de la roche.
Des hommes m'ont faconné comme ils le voulaient.
C'était dans les années 50.
Je suis sorti des chaines de montages dans une petite ville suisse
Du canton de Zürich, précisément à Wetzikon.
A peine sorti, le patron vint me chercher.
Je suis venu en Valais. je n'y suis jamais reparti.
Lors de mes débuts, je faisais la joie de mon chauffeur.
Je montais gaillardement les vallées Valaisannes, transportant terre, gravier, des fois mêmes personnes quand je resedcendais.
Il était fier de moi. A l'heure du dîner, il se démerdait pour me mettre en vue.
Cela a duré 10 ans.
Ensuite, mon premier chauffeur a touché un autre que moi
il était bien plus jeune, était bien plus costaud !
Donc, c'est la que je touchai mon deuxième chauffeur.
C'était un petit jeune, qui devait se faire la main.
Mais tout s'était très bien passé, j'ai encore vécu quelques bonnes années
Et vint ensuite... la suite
J'avais 20 ans. je n'étais plus vraiment en pleine forme, les petites routes m'ont bien usé.
Mon patron décida donc de me mettre dans une carrière, vers Fully.
la route pour y monter est très étroite, mais pas grave, je resterai en haut.
Et la haut, les conditions ne sont pas drôles. D'ailleurs, on m'a
greffé une sortie de pare buffle, pour écarter d'éventuels rochers.
J'ai passé encore 10 ans la haut.
Et puis sont venus les temps durs. la gravière n'était plus rentable
Progressivement, j'ai senti que ca tournait mal.
On ne m'a plus fait d'entretien. on laissait venir la rouille gentiment,
mais je travaillais toujours un peu.
Puis un jour, un saurer est monté a cette gravière, on l'a chargé de divers outils. On a aussi mis dessus la dynamite.
Et pendant plusieurs mois, je suis resté sur place a attendre...
E ettectivement, mon patron est revenu. Ah, que j'étais soulagé !
Il est arrivé vers moi, a ouvert la porte, et je m'attendais a ce qu'il
me mette en route. mais non, il prit juste quelques papiers, ainsi que
mes plaques d'immatriculation.
J'étais triste... je sentais que ca tournait mal.
Et encore quelques temps plus tard, des gens que je connaissais pas
sont venus. ils m'ont dépouillé entièrement. ils ont pris mes caches
culasses, mon volant, ainsi que plein d'autres pièces.
J'avais touché le fond. c'est là que j'ai compris que c'était fini pour moi.
Il y a maintenant 30 ans que je n'ai pas bougé.
Je suis resté seul toutes ces années.
J'ai vu passer l'été, l'automne, l'hiver, le printemps...
je me souviens la dernière fois ou mon moteur a tourné. le chauffeur disait : bon j'le mets la en attendant ?
et il est parti... emportant avec lui son sac a dos.
Passer sa vie a rendre de bons et loyaux services, pour finir ainsi ? c'est trop bête. enfin, je ne suis "qu'un" camion...
J'attends... j'attends.... dans ma montagne
Le temps me semblera encore long. mais je reviendrai a la terre, dans
ce décor, je commence a m'y fondred'ou je suis parti. et peut etre
connaitrais-je une deuxième vie...